Evaluation Team
Le présent rapport a été établi par M. Tesfaye TEKLU, Consultant, Spécialiste du développement agricole, sous la supervision générale de M. Foday TURAY, Chargé principal de l’évaluation rétrospective, Département de l’évaluation des opérations (OPEV), à la suite de la mission effectuée par M. TEKLU en Éthiopie.
Objective
La présente revue porte essentiellement sur les résultats de l’assistance de la BAD au secteur agricole. Elle vise à évaluer la performance de l’assistance de la BAD au secteur agricole afin d’établir le bilan des réalisations, ainsi qu’à tirer des leçons de l’expérience et à proposer des améliorations en ce qui concerne les interventions actuelles et futures du Groupe
de la Banque. Par ailleurs, la présente revue a vocation à servir de base à l’évaluation future de la performance et de l’impact de l’assistance de la BAD au secteur de l’ADR.
Main Lessons
- Il existe d’importants processus qui contribuent à la pertinence de l’assistance au secteur de l’ADR : les enseignements tirés par le Groupe de la Banque en ce qui concerne les potentialités et contraintes liées au développement agricole du pays et l’amélioration de ses connaissances y relatives, en investissant dans les études ; le respect de la vision du Groupe de la Banque en matière de réduction de la pauvreté et de sa politique agricole ; le processus de coordination des interventions des bailleurs de fonds géré par le GoE, en tant que mécanisme d’identification des projets ; et les consultations avec les parties prenantes au niveau national. Le fait de s’en remettre au GoE pour l’identification des projets obéit au principe d’appropriation par le pays, pour autant que le Groupe de la Banque procède à sa propre évaluation indépendante, sur la base de ses propres principes directeurs et de ses avantages comparatifs et participe de manière proactive au dialogue en vue d’assurer la mise en œuvre des réformes stratégiques nécessaires.
- La qualité des études commanditées en vue de l’identification des projets a tendance à être excellente, lorsque ces études reposent sur des travaux de recherche académiques de longue date et/ou bénéficient du ferme soutien du GoE. En revanche, les études ont tendance à être de faible qualité, lorsque les liens entre le Groupe de la Banque et la communauté de la recherche sont peu solides. La mise à profit des connaissances empiriques disponibles, la mise en commun et l’exploitation de l’expertise existante et la souplesse en matière degestion des études constituent des facteurs essentiels pour l’amélioration de la qualité des projets, au moment de la conception.
- Plusieurs facteurs expliquent la faible performance du Groupe de la Banque en ce qui concerne la mise en oeuvre des interventions, à savoir le manque de précision ou la compréhension insuffisante des règles et procédures ; le déséquilibre entre la taille et lacomplexité des projets, d’une part et la capacité d’exécution, d’autre part, qui a été davantage affaiblie par la décentralisation de l’administration publique ; les retards liés à la résolution des problèmes opérationnels qui surviennent et à la prise de mesures correctives, en particulier au début de l’exécution ; la faiblesse de la performance en matière d’assurance de la qualité ; le manque de familiarité avec la complexité des questions ; et l’insuffisance de l’utilisation (ou du renforcement des capacités) du personnel de ETCO pour l’appui technique et administratif.
- Les facteurs sous-jacents du coût-efficacité des projets – qui se manifestent sous forme de retards liés à la passation des marchés et au décaissement des ressources, ainsi que de difficultés à retenir le personnel qualifié – sont les insuffisances liées à la conception des projets ; le manque de souplesse en matière d’exécution de projet ; l’inadéquation des capacités d’exécution pour la taille des projets (ou le séquençage du renforcement des capacités) ; la mauvaise gouvernance des projets (l’ingérence politique dans les décisionsliées à la gestion des projets) ; l’insuffisance de mesures incitatives (absence de système de récompense pour la performance avérée) ; et le laxisme du GoE, eu égard au respect des dispositions juridiques en vigueur.
- Le développement institutionnel a tendance à être faible dans un environnement caractérisé par l’insuffisance de l’appui technique (par exemple, l’élaboration d’indicateurs susceptibles de faire l’objet de suivi pour un S&E efficace) ; l’inadaptation des mécanismes organisationnels existants aux besoins des projets ; la faiblesse de la structure de stimulants ; l’existence d’ambiguïtés d’ordre politique et/ou juridique (par exemple, les droits de propriété non définis qui régissent la terre et l’eau) ; et l’insuffisance de la mobilisation et de la participation communautaires.
- La durabilité des avantages liés aux projets à un coût abordable dépend de l’efficacité opérationnelle, telle que définie par la viabilité financière et économique (efficacité et efficience), du développement institutionnel, de la capacité à résister aux facteurs extérieurs et de l’engagement de l’État, en particulier le soutien sur les plans stratégique et juridique. La durabilité est assurée, lorsque la viabilité financière est solide, les mécanismes institutionnels sont efficaces, les différentes institutions offrent suffisamment de stimulants et permettent de prendre des risques mesurés, et lorsqu’il existe des plans d’urgence pour la mise en commun des risques et moins d’incertitudes stratégiques et juridiques. La mention « insatisfaisante » obtenue par la plupart des projets du secteur de l’ADR s’explique essentiellement par le non-respect de la majorité de ces conditions essentielles.
Main Recommendations
Recommandations à la Banque :
- Depuis le milieu des années 90, le Groupe de la Banque a pris d’importantes mesures en vue d’améliorer la performance des projets en termes d’efficacité : amélioration de l’appropriation des projets, de la pertinence et de la qualité initiale des projets, ainsi que de la performance en matière d’exécution.
- Améliorer les normes en vue d’assurer la pertinence : La Banque doit continuer d’accorder la priorité à la promotion de l’agriculture à petite échelle en mettant un accent particulier sur la réduction de la pauvreté et la sécurité alimentaire. L’application des règles de conformité, d’alignement et de confirmation est souhaitable afin d’assurer la pertinence. En outre, la Banque doit faire preuve d’une plus grande transparence en ce qui concerne le choix des projets, en s’appuyant sur ses principes fondamentaux et ses avantages comparatifs ; assurer une justification économique solide pour le lieu d’implantation des projets ; et utiliser les moyens analytiques et financiers de promotion des changements stratégiques et institutionnels en vue d’améliorer l’efficacité des projets.
- Continuer d’investir dans les études préalables aux projets : La pratique qui consiste à « mettre au point les nouveaux projets sur la base de l’étude des conditions préexistantes » constitue un important pas en avant pour la Banque et un outil essentiel lui permettant d’être proactive en ce qui concerne le choix des investissements à effectuer. Elle mérite, par conséquent, d’être maintenue en consacrant davantage d’efforts à l’amélioration du contenu analytique et de l’assurance qualité. Il y a lieu d’intégrer dans ces études une analyse minutieuse des expériences antérieures, de diffuser les enseignements essentiels afin de mettre au point des projets cohérents, d’évaluer les capacités institutionnelles etd’exécution existantes, et de comprendre les sources potentielles des risques qui affectent la performance des projets.
- Assurer la cohérence au sein des projets et entre ceux-ci : Tant que la Banque maintiendra son approche projet actuelle, il sera utile d’adopter une démarche holistique, tel que recommandé dans la politique du Groupe de la Banque pour le secteur de l’agriculture et du développement rural (ADB/ADF, 2001), afin d’optimiser l’efficacité des projets, en veillant à ce que leurs principales composantes soient exécutées simultanément. L’actuel Projet d’appui à l’agriculture constitue un exemple, à cet égard, qui compte parmi ses composantes l’irrigation à petite échelle, la récupération de l’eau de pluie, la mise au point et la commercialisation des cultures, la gestion intégrée des écosystèmes et le renforcement des capacités humaines et institutionnelles. Pour autant que l’on intègre au projet d’autres composantes qui font défaut dans sa conception actuelle, notamment l’accès aux routes et aux marchés, et que des services de crédit soient disponibles dans les zones de projet, la cohérence sera assurée entre les différentes composantes. Une approche intégrée, en tant que telle, pourrait ne pas être couronnée de succès dans certains contextes. Par conséquent, il convient plutôt de promouvoir une approche progressive et d’apprentissage.
- Le présent rapport réitère la recommandation formulée au cours de la mission d’identification du secteur de l’agriculture de fin 2002, qui en appelait au passage de l’approche projet à une démarche qui consiste à intégrer tous les projets dans un programme clairement défini et intégré d’appui au secteur de l’agriculture axé sur le monde rural.
- Adapter la taille et la complexité des projets aux capacités opérationnelles : Il est nécessaire soit d’adapter la portée des projets aux capacités d’exécution, soit d’adopter une approche progressive en vertu de laquelle la taille du projet augmenterait, à mesure que les capacités d’exécution et institutionnelles se développeraient.
- Prévoir une marge de souplesse : Il y a lieu de négocier mûrement les conditions d’exécution – de manière à assurer un niveau minimum d’ambiguïté, de prévoir une marge de souplesse pour l’adaptation à l’évolution des conditions pendant la phase d’exécution et de déléguer davantage de pouvoirs et de responsabilités au bureau pays afin de lui permettre de s’acquitter pleinement de ses responsabilités.
- Mettre en place un système efficace de S&E et de réponse : Il est nécessaire d’évaluer minutieusement les capacités d’exécution, en mettant en place un système de suivi et d’évaluation, et de s’adapter efficacement à l’évolution de la situation en vue de veiller à ce que les projets soient exécutés conformément aux objectifs, calendriers et plans d’exécution établis. Il y a lieu, en outre, d’améliorer la communication, d’assurer une supervision adéquate, d’apporter une solution souple, mais opportune et idoine aux problèmes afin de veiller à ce que l’exécution des projets se déroule comme prévu.
- Le but du S&E consiste non seulement à assurer le suivi de la performance en matière d’exécution en tant que tel, mais également à tirer des leçons et à mettre les connaissances acquises au service de l’amélioration de la conception des projets (ou interventions) ultérieur(e)s. Par exemple, il est difficile de déterminer la mesure dans laquelle les leçons tirées des projets antérieurs ont été mises à profit pour la nouvelle génération de projets. L’absence de dépositaires de l’expérience et des leçons tirées du passé est intolérable dans le contexte actuel de la technologie de l’information.
- Participer de manière proactive au dialogue sur les politiques : Les bailleurs de fonds se concertent régulièrement avec le GoE afin d’assurer l’harmonisation et la coordination. Ce forum permet au Groupe de la Banque de participer de manière proactive à la définition des domaines d’intervention prioritaires. Compte tenu du pouvoir financier de la Banque et de la présence du bureau extérieur dans le pays, il est nécessaire d’améliorer son efficacité en ce qui concerne la promotion de l’évolution stratégique et la mobilisation des ressources en vue de financer la croissance, en partenariat avec la communauté des bailleurs de fonds. Le renforcement des capacités analytiques d’ETFO/BAD, appuyé par les unités de la recherche et des politiques du Groupe de la Banque, contribuerait à améliorer le profil et l’efficacité de la Banque.
- Des consultations permanentes avec le pays emprunteur, les bailleurs de fonds et le personnel de projet sont également nécessaires afin d’assurer la concordance entre les objectifs, le calendrier d’exécution et le fonctionnement des projets, d’une part, et ceux des réformes stratégiques complémentaires, d’autre part. Il existe encore des activités qui se chevauchent et qui pourraient réduire le coût-efficacité de leurs interventions, notamment les projets de développement de l’élevage (Groupe de la Banque et Banque mondiale). Une meilleure coordination s’impose à tous les niveaux (c’est-à-dire au niveau des politiques, stratégies et programmes), au sein de la communauté des bailleurs de fonds et entre les bailleurs de fonds et le GoE.
- Promouvoir les pratiques optimales potentielles : Le Groupe de la Banque doit, parfois, établir une distinction entre les projets sur la base de leur contribution potentielle aux pratiques optimales sous forme de leçons susceptibles d’être mises au service d’autres pays africains. Le RUFIP est un projet qui présente des potentialités similaires. Pour ce type de projet, l’on doit s’attacher non seulement à déterminer si le projet satisfait aux exigences opérationnelles pertinentes, mais également à intégrer l’étude référence, une performance bien définie en matière de suivi et l’évaluation de l’impact en termes de développement. Au nombre des produits d’un tel projet figurent « les expériences susceptibles d’être reproduitesou d’être portées à échelle » dans d’autres pays.
Recommandations au Bénéficiare :
- Le bilan du GoE indique une amélioration du cadre stratégique pour un développement rural et agricole à large assise et pour la mise au point judicieuse des projets. Comme c’est le cas pour le Groupe de la Banque, les faiblesses du GoE ont trait à l’exécution des projets, au renforcement des capacités institutionnelles, notamment le suivi et l’évaluation, et à la durabilité. Par conséquent, les recommandations formulées à l’intention du Groupe de la Banque s’appliquent également au GoE, en particulier « la poursuite del’investissement dans les études préalables aux projets », « l’adaptation de la taille et de la complexité des projets aux capacités opérationnelles », « la mise en place de systèmes efficaces de S&E » et « la mise à profit des leçons tirées de l’expérience et la promotion des pratiques optimales ».
- En outre, la prise en compte des recommandations suivantes permettrait d’améliorer l’efficacité de l’ADR.
- Politiques incomplètes ou manquantes : Le GoE a créé un cadre de politique propice au développement rural induit par l’agriculture à petite échelle : les politiques macroéconomiques, les programmes de réduction de la pauvreté et la stratégie de sécurité alimentaire. Il existe également d’importantes politiques agricoles qui s’attaquent aux principaux obstacles à la croissance : le développement de l’infrastructure, le transfert des technologies et la création d’une main-d’oeuvre qualifiée et d’institutions agraires. Cependant, certaines politiques font défaut ou sont incomplètes, lorsqu’elles existent. Il s’agit, notamment, des politiques sur les droits de propriété d’une manière générale, et la propriété foncière, la réforme et le séquençage des marchés des intrants et financier, le développement du secteur privé, ainsi que la mobilité et l’établissement des populations, en particulier.
- Mettre au point un programme sectoriel qui assure une affectation efficace des ressources : La croissance dans le secteur agricole a été lente et son efficacité en termes d’amélioration du bien-être des populations a été faible. Il y a lieu de redoubler d’efforts en vue de stimuler et d’accélérer la croissance et la transformation du secteur agricole. Ceci nécessite une compréhension approfondie des obstacles à la croissance dans le secteur, dans les milieux de production hétérogènes qui le caractérisent, ainsi que l’élaboration d’un programme d’investissement sectoriel qui prenne en compte les différences entre les voies de développement. Avec un tel programme, il y a lieu d’assurer une plus grande clarté en ce qui concerne les règles qui régissent l’affectation des investissements, le choix du lieu d’implantation des projets et l’engagement des ressources.
- Le financement des études sur lesquelles repose l’identification des projets (notamment, les précieuses études sur les bassins fluviaux effectuées par le MoWR) est un fait louable. Les avantages liés aux décisions d’investissement éclairées justifient le fait que le GoE continue d’investir dans les études lui permettant d’identifier les projets et programmes agricoles dont les résultats sont essentiels pour la croissance et la réduction de la pauvreté.
- Renforcer et améliorer les capacités d’exécution de projets au niveau local : Les progrès en matière de réforme de la fonction publique et de renforcement des capacités humaines au niveau local méritent d’être poursuivis (par exemple, l’accroissement de la capacité des centres de formation des agriculteurs et le renforcement des compétences des vulgarisateurs). Il y a lieu de redoubler d’efforts afin d’améliorer la gouvernance des projets en vue de promouvoir l’obligation de rendre compte et la responsabilité financière. Les efforts déployés en vue de créer des organisations à base communautaire ont des chances de se traduire par l’amélioration de la fourniture des services et la réduction des coûts de transactions, à mesure que les problèmes liés à la gouvernance s’atténueront. La promotion du secteur privé en tant que partenaire de ces organisations à base communautaire est essentielle pour élargir et approfondir le développement du secteur privé dans les zones rurales d’Éthiopie (par exemple, l’établissement de liens entre les institutions de microfinance et les associations communautaires de crédit et d’épargne).
- Renforcer les capacités des dépositaires des leçons apprises et reproduire les pratiques optimales : Une composante essentielle du développement institutionnel a trait au renforcement des systèmes de suivi et d’évaluation de l’impact. Il est important de veiller à ce que des indicateurs de suivi appropriés soient intégrés dans la conception des projets et fassent l’objet d’un suivi régulier en vue d’évaluer les progrès et de combler les nouvelles lacunes en matière d’exécution. La combinaison du suivi avec une évaluation sélective de l’impact permet également de tirer des leçons de l’expérience et de mettre les connaissances acquises au service d’une meilleure conception des projets (ou interventions) ultérieur(e)s. L’absence de dépositaires de l’expérience, la perte de la mémoire institutionnelle et l’insuffisance du partage de l’information dans l’environnement actuel de la technologie de l’information limitent le débat et le dialogue sur les politiques.
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Ethiopie Revue de l’assistance du groupe de la banque au secteur de l’agriculture et du développement rural, 1993-2004.PDF | 290.01 Ko |