Promouvoir l’intégration régionale en afrique-Évaluation des opérations multinationales de la banque, 2000 - 2010

Date: 12/09/2012
Type: Évaluation thématique
Secteur(s): Economie & gouvernance financière
Thème(s): Assurance Qualité & Résultats, Intégration Régionale
Statut: Achevé(e)
Ref.: TR10000

Evaluation Team

Le présent rapport de synthèse a été préparé par Albert-Enéas Gakusi, chargé d’évaluation en chef, sous la direction d’Odile Keller, chef de la division
des évaluations de haut niveau au Département de l’évaluation des opérations (OPEV) de la Banque africaine de développement. Franck Perrault, directeur par intérim d’OPEV (de mai 2011 à janvier 2012) et Rakesh Nangia, directeur d’OPEV depuis janvier 2012, en ont assuré la direction générale. L’évaluation a également bénéficié de l’appui et des commentaires de Mohamed Manai, chef de la division de l’évaluation des projets et programmes.

Récapitulation vidéo de l'évaluation du chef de l'équipe de travail: Albert-Enéas Gakusei, chef de la direction de l'évaluation

Objective

La présente évaluation porte sur :  

(a) la pertinence et la cohérence du cadre stratégique et opérationnel de la Banque pour la promotion de l’intégration régionale et

(b)  la pertinence, l’efficacité, l’efficience, et la durabilité des opérations multinationales de la Banque. Elle examine les facteurs clés de performance des opérations multinationales, l’efficacité organisationnelle de la Banque et elle fait des recommandations en vue d’une amélioration. L’évaluation couvre la période de 2000 à 2010. Comme l’évaluation ne prend pas en compte les opérations concernant un seul pays qui ont contribué à l’intégration régionale, il se peut que la contribution globale de la Banque à l’intégration régionale soit plus importante que ce qui est indiqué dans le présent document (les bases de données de la Banque n’identifient pas les opérations concernant un seul pays qui contribuent à l’intégration régionale
et, par conséquent, la présente évaluation ne peut pas les prendre en compte).

Main Findings

  • La Banque s’est dotée d’une bonne stratégie pour orienter ses activités en matière d’intégration régionale ainsi que d’un cadre de programmation pour améliorer l’orientation stratégique et garantir une plus grande sélectivité dans l’utilisation des ressources du FAD. Cependant, d’autres améliorations sont nécessaires.
  • La Banque a sensiblement augmenté la part des opérations multinationales dans le nombre total des approbations de la Banque, la faisant passer de 6 % (en 2000) à 15,4 % (en 2010). La composition du portefeuille des opérations multinationales par secteur a évolué en même temps que les priorités de la Stratégie à moyen terme et du FAD. La Banque a répondu à la demande croissante pour les opérations multinationales en augmentant l’enveloppe de ressources du FAD consacrée à l’intégration régionale, tout en mettant en place de fortes incitations financières en faveur des pays bénéficiant des ressources du FAD.
  • Les opérations multinationales ne sont pas moins efficaces que les opérations concernant un seul pays pour réaliser leurs objectifs. Rien ne permet d’affirmer que les opérations multinationales de la Banque sont moins efficaces, moins efficientes ou moins durables que les opérations concernant un seul pays, même si elles sont plus complexes et rencontrent plus de difficultés aux stades de la conception et de la mise en oeuvre. Les raisons pouvant expliquer la meilleure performance des opérations multinationales vont des imperfections liées aux outils de mesure et de rendre compte des résultats à l’hypothèse que les opérations multinationales qui ont été soumises aux processus de sélection et d’évaluation relativement rigoureux sont particulièrement aptes à supporter des conditions difficiles. La durabilité et l’efficience demeurent un défi pour la plupart des opérations multinationales, de même que pour les opérations concernant un seul pays.
  •  Parmi les facteurs déterminants dans la performance des opérations multinationales, figurent l’engagement et l’appropriation au niveau des pays, les mécanismes d’exécution et de gouvernance et la mise en place d’un cadre de politique générale favorable. Une revue de la qualité à l’entrée (QAE) des opérations multinationales approuvées entre 2006 et 2010 a révélé que la Banque a eu une performance « moyennement bonne ou meilleure» dans ces domaines. Toutefois, l’alignement accru sur les priorités nationales et régionales n’a pas été suivi par une analyse rigoureuse des options, par des calculs adéquats des coûts et bénéfices (un problème qui touche particulièrement les projets autres que les projets d’infrastructure, même s’il manque aux projets d’infrastructure une analyse coûts-bénéfices, notamment au stade de l’achèvement des projets) et par une évaluation des risques pour permettre aux autorités publiques de prendre des décisions éclairées sur les coûts d’opportunité liés aux opérations multinationales. La Banque a de solides antécédents en ce qui concerne la description détaillée des mécanismes d’exécution et de mise en oeuvre (capacité de l’organe d’exécution, rôles et responsabilités, etc.), mais semble attacher moins d’importance aux principes qui soustendent les mécanismes de gouvernance concernés. Enfin, la contribution des opérations aux résultats en matière de développement est plus susceptible d’être durable si des mesures d’accompagnement et des réformes des politiques sont adoptées au niveau des pays. Quand bien même le programme d’intégration régionale est intégré de plus en plus dans les DSP, les bureaux extérieurs n’ont pas encore engagé le type de dialogue stratégique de haut niveau qu’il faut pour susciter les conditions et l’engagement politique nécessaires pour pérenniser les résultats des projets.
  • La capacité de la Banque d’exécuter son mandat en matière d’intégration régionale s’est nettement améliorée avec la création d’ONRI, même si des précisions supplémentaires concernant son mandat et une clarification des responsabilités des différents départements impliqués dans l’intégration régionale pourraient améliorer son efficacité. La création d’ONRI a marqué un tournant dans le renforcement de la vision stratégique de la Banque et dans l’amélioration de sa capacité à être de plus en plus sélective dans les opérations multinationales. Toutefois, en raison du manque d’ancrage de son cadre stratégique et de son mandat, ONRI n’a pas encore élaboré un programme de travail précis pour faire face à la dimension immatérielle de l’intégration régionale. Les relations d’ONRI avec les autres départements de la Banque sont essentielles pour promouvoir une approche de l’intégration régionale à l’échelle de la Banque, mais son rôle dans l’élaboration des politiques et des stratégies vis-à-vis de ces départements n’est pas clairement défini. Peu d’éléments permettent d’affirmer que les leçons tirées du suivi et évaluation influencent la programmation ou la conception des opérations multinationales, notamment compte tenu du fait qu’il n’existe aucun département chargé de compiler et de diffuser ces leçons.
  • Le modèle opérationnel qui s’applique aux opérations multinationales de la Banque n’est pas adapté aux exigences spécifiques des opérations multinationales. Par exemple, les incitations offertes au personnel ne tiennent pas compte de la complexité des opérations multinationales. Les outils existants (notations, mode de présentation des REP, diffusion de l’information) ne sont pas parfaitement adaptés à la spécificité des opérations multinationales et n’aident pas toujours à garantir la transparence, la responsabilité et l’apprentissage. Les bureaux extérieurs n’ont pas de responsabilités clairement définies en ce qui concerne les opérations multinationales et le dialogue sur les politiques au niveau national ne prend pas suffisamment en compte le programme d’intégration régionale.

Main Lessons

  • Si les avantages d’une route multinationale sont pleinement réalisés, il est absolument indispensable de résoudre le problème du poste-frontière unique dès le stade de la conception d’un projet. Il est également nécessaire de supprimer les obstacles non physiques, notamment par l’harmonisation des politiques, des règles, des normes et procédures des autorités nationales de réglementation, ainsi que les barrages routiers et les contrôles aux frontières, qui sont perçus comme des limites concrètes au commerce.
  • Pour accroître l’impact en termes de développement des projets d’infrastructure régionaux, il importe que des politiques nationales complémentaires soient conçues et mises en oeuvre de façon judicieuse.
  • L’absence d’autorités de réglementation indépendantes au niveau régional pour assurer l’application des règles contractuelles convenues peut être un obstacle à l’efficacité du projet en cas de désaccord entre les opérateurs.
  • La coordination des donateurs doit aller au-delà des accords de cofinancement et la mise en place des comités de mise en œuvre du projet, afin d'examiner les mesures douces et politiques qui se complètent et de maintenir les résultats des projets d'infrastructure. 
  •  La forte convergence entre les priorités de développement et les objectifs des partenaires publics et privés des opérations multinationales, ainsi que le rendement adéquat des investissements, sont des facteurs essentiels à la bonne exécution des projets et à la réalisation de résultats durables.
  • La fourniture de services essentiels (écoles, centres de santé, bornes-fontaines, formation, etc.) aux communautés affectées par les grandes infrastructures de production est d’une importance capitale pour garantir la durabilité de l’opération. 

Main Recommendations

Recommandation(s) à la Banque :

  • La Banque devrait élaborer une définition claire des opérations multinationales valable pour toute l’organisation, pour caractériser les opérations multinationale contribuant à l’intégration régionale. Cette définition devrait être basée sur un ensemble de critères semblables à ceux utilisés pour déterminer l’éligibilité financière des opérations multinationales au titre du FAD et liées à la chaîne de résultats du cadre stratégique. Ces critères devraient être appliqués à la fois aux opérations du secteur privé et du secteur public ; et devraient également être utilisés pour identifier les opérations concernant un seul pays qui contribuent à l’intégration régionale. Les systèmes d’information de la Banque (en particulier le SAP) devraient être adaptés en vue de distinguer les opérations selon deux paramètres distincts : a) celles qui se déroulent dans un ou plusieurs pays et b) celles qui apportent (ou n’apportent pas) une contribution significative à l’intégration régionale. Ces catégories aideraient à améliorer la connaissance du rôle de la Banque dans la promotion de l’intégration régionale et permettraient à la Banque de mieux apprécier sa contribution globale.
  • La Banque devrait mieux concentrer ses efforts lorsqu’il s’agit de s’attaquer aux contraintes immatérielles qui pèsent sur l’intégration régionale et préciser les domaines où il convient de fournir des biens publics régionaux. S’agissant des contraintes immatérielles, une possibilité serait de concentrer son attention sur les contraintes liées au cadre réglementaire et administratif dans les secteurs où la Banque est la plus active. Pour ce qui est des biens publics régionaux, la Banque devrait définir un nombre limité de domaines où elle possède l’expertise appropriée et où elle peut apporter le plus de valeur ajoutée par rapport aux autres bailleurs de fonds.
  • La Banque devrait définir le rôle des opérations du secteur privé, en tenant compte de la contribution que ces opérations et le secteur privé, plus généralement peuvent apporter à la promotion de l'intégration régionale.
  • Un mécanisme permettant d’assurer une retroinformation systématique et de tirer des leçons de l’expérience de la Banque devrait être mis en place afin d’influencer la conception des nouvelles opérations, notamment en relation avec les facteurs déterminants de la performance. Ce mécanisme devrait clairement définir les responsabilités en ce qui concerne la collecte, la validation, l’analyse et l’utilisation de l’information pour l’élaboration des politiques et des programmes. Il devrait encourager l’apprentissage à l’interne sur les caractéristiques spécifiques des opérations multinationales (par exemple, les accords de gouvernance, les dispositifs juridiques qui sous-tendent ces accords, le partage des coûts, etc.) et compte tenu du temps nécessaire pour la mise en oeuvre des opérations multinationales, le mécanisme de rétro-information devrait permettre que les enseignements soient tirés non seulement à l’achèvement de l’opération, mais aussi durant son exécution. 
  • La mission et les ressources d’ONRI doivent être mises en cohérence. La Banque devrait accroître les ressources d’ONRI pour qu’elles soient en adéquation avec son mandat ou recadrer sa mission en fonction des ressources disponibles. La mission d’ONRI devrait consister à créer un maximum de valeur ajoutée pour la Banque plutôt qu’à disperser les ressources pour répondre à des demandes ponctuelles. Il devrait s’attacher surtout à fournir des services de conseil stratégiques de haut niveau, à assurer la production et la gestion du savoir, ainsi qu’à collaborer avec les CER et les autres institutions qui soutiennent l’intégration régionale en Afrique.
  • La Banque devrait définir clairement les rôles, les responsabilités et la répartition des tâches entre ONRI, les départements régionaux et les départements sectoriels. Les départements régionaux et sectoriels devraient désigner des points focaux qui collaboreront avec ONRI et seront chargés d’intégrer le programme d’intégration régionale dans les DSP, les stratégies sectorielles et les opérations. Les responsabilités liées au suivi et au fait de rendre compte des résultats sur les DSIR devraient être précisées. Les responsabilités des bureaux extérieurs devraient être mieux définies et leurs capacités renforcées afin qu’ils puissent engager un dialogue stratégique de haut niveau sur les questions d’intégration régionale. Ces rôles et responsabilités devraient être clairement spécifiés et diffusés dans l’ensemble de la Banque.
  • Les outils et le modèle opérationnel de la Banque devraient être adaptés aux spécificités des opérations multinationales. Les mesures nécessaires comprennent notamment: a) la définition d’un ensemble de critères spécifiques pour les revues sur l’état de préparation des opérations multinationales ; b) la délégation de la responsabilité générale de chaqueopération multinationale à un chef de projet ; c) l’octroi d’un délai et de ressources supplémentaires pour la conception et la supervision des opérations multinationales ; d) un réexamen du format des REP relatifs aux opérations multinationales et e) l’adaptation des incitations du personnel pour leur permettre d’assumer les tâches nécessaires pour des opérations multinationales complexes et intersectorielles.