Evaluation Team
Direction d’OPEV
Rakesh Nangia, Directeur OPEV
Franck Marie Perrault, Directeur par intérim (au moment de l’évaluation)
Mohamed Hedi Mohamed, Chef de Division, Evaluation des projets et programmes, OPEV.1
Odile Keller, Chef de Division, Evaluation de Haut Niveau, OPEV.2
Objective
La finalité du projet est d’améliorer les conditions socio-sanitaires et environnementales des zones urbaines et périurbaines de la ville de Dakar. En termes d’effets, des améliorations étaient attendues au niveau de : (i) la capacité d’épuration des eaux usées domestiques par la station de Cambérène; (ii) la capacité de pompage des eaux usées domestiques des « Parcelles Assainies »; (ii) l’application des bonnes pratiques sanitaires et d’hygiène et (iv) la capacité organisationnelle de l’ONAS ; (v) la valorisation des sous-produits d’épuration (eaux usées, boues et gaz méthane) ; (vi) la qualité des eaux rejetées en mer ; (vii) l’incidence des maladies liées à l’insuffisance d’hygiène et d’assainissement ; et (viii) la capacité opérationnelle de l’ONAS (voir modèle logique en annexe 2).
Main Findings
- Le projet est jugé pertinent, dans la mesure où ses objectifs et composantes sont entièrement compatibles avec les priorités du Gouvernement dans le secteur d’alimentation en eau potable et d’assainissement ; il constitue un prolongement du Programme Sectoriel Eau à Long Terme (PLT) qui est la pièce maîtresse de la stratégie à long terme du secteur. Le projet répond à un besoin réel des populations de la ville de Dakar et ses environs, confrontées à d’énormes problèmes d’assainissement. Il est en outre conforme à la stratégie de la Banque pour le Sénégal (1999-2001) qui vise sous le pilier « infrastructures », le renforcement des viiiéquipements à caractère social dans les zones urbaines et périurbaines. Les besoins d’assainissement de la ville de Dakar, en perpétuelle évolution, sont toujours énormes.
- La qualité à l’entrée est par contre jugée peu satisfaisante en raison : (i) d’une insuffisante prise en compte des contraintes liées au procédé d’épuration retenu (boues activées), par rapport au contexte de Dakar ; (ii) de la validation par la Banque d’une solution incomplète et peu optimale pour faire face aux contraintes financières et (iii) de la non-prise en compte des enseignements du passé sur l’intégration des eaux pluviales et autres déchets solides.
- La conception a en outre occulté le problème de l’émissaire actuel1 qui présente des caractéristiques hydrauliques médiocres et une pérennité non-garantie. Elle s’est en outre limitée à la restructuration du réseau d’assainissement existant sans l’étendre davantage pour faciliter le raccordement des ménages. Enfin, l’évaluation ex-ante a sous-estimé les coûts du projet et aucune véritable étude d’impact environnemental et social n’a été réalisée.
- Au niveau des réalisations physiques, sur deux nouvelles unités d’une capacité de traitement de 10 000 m3/j d’eaux usées chacune (soit 20 000 m3/j au total), le projet n’a pu construire qu’une unité incomplète (dépourvue de la filière boue) dotée d’une capacité de traitement de 11 300 m3/j. En somme, le projet a permis d’augmenter la capacité de traitement secondaire de la STEP de Cambérène de 5 700 à uniquement 17 000 m3/j, en raison d’une réduction drastique de la masse des travaux initialement prévus sur cette composante. En revanche, le projet a significativement amélioré le système de pompage des eaux usées du quartier des Parcelles Assainies (constitué de 26 unités) à travers une restructuration du réseau et un renforcement des capacités du système de pompage (réhabilitation de cinq stations et construction de quatre autres) avec comme corollaire un accroissement du volume d’eaux usées refoulées vers la STEP de Cambérène.
- En termes de fonctionnalité, les ouvrages et équipements réalisés à la STEP de Cambérène dans le cadre du projet sont dans un état de fonctionnement normal. Par contre une partie des équipements du prétraitement réalisés depuis 20042 sont hors services et seraient3 en cours de réhabilitation. Au moment de la mission, la station était momentanément à l’arrêt du fait des fortes pluies enregistrées à Dakar, occasionnant l’inondation de la station et en particulier de la centrale énergétique qui constitue le coeur du système.
- Quant aux ouvrages liés au système de pompages des eaux usées des Parcelles assainies, la totalité des équipements hydrauliques et électromécaniques sont fonctionnels, avec toutefois quelques pannes récurrentes. Il est par ailleurs noté une altération des équipements métalliques (essentiellement les générateurs et les réservoirs anti-bélier) du fait de leur exposition au courant marin. Dans l’ensemble, le fonctionnement de l’ensemble des ouvrages du projet est affecté par les fréquentes coupures d’électricité au Sénégal quoique leur impact soit atténué par les groupes électrogènes installés au niveau de chaque station.
- L’insuffisante capacité de traitement de la station par rapport au volume des eaux usées y entrant contraint à dévier une partie de l’effluent prétraité (by-pass) et à rejeter une grande partie des boues en excès avec l’effluent épuré, faute de pouvoir les traiter du fait de la non-réalisation de la 3ème filière, ce qui compromet sévèrement son efficacité. Compte tenu du mélange des eaux traitées avec les eaux by-passées, du niveau des effluents bruts rejetés directement à la mer et de la faible valorisation des sous-produits d’épuration, le projet ixs’intègre dans un système qui actuellement ne répond nullement aux normes environnementales en matière de qualité de rejet. La situation est par ailleurs accentuée par la non-résolution du problème de l’émissaire en mer ; le rejet actuel étant beaucoup trop proche du rivage pour protéger la côte des pollutions. Cette contreperformance était plus ou moins prévisible, en raison des exigences techniques et énergétiques des procédés par boues activées et leur extrême sensibilité aux variations de débit et de charge ainsi qu’au faible niveau d’investissement par rapport à l’ampleur des besoins.
- Les comportements et habitudes des bénéficiaires vis-à-vis des infrastructures qui n’ont pas fondamentalement changé en dépit des différentes actions d’IEC encore éphémères, nuisent aussi à l’efficacité du projet. Par conséquent, la contribution du projet dans l’amélioration des conditions socio-sanitaires et environnementales des populations cibles reste limitée. L’atteinte des objectifs et des résultats du projet (Efficacité) est dans l’ensemble jugée peu satisfaisante.
- En termes d’efficience, les retombées économiques du projet ont été limitées par : (i) la réduction opérée au niveau des réalisations physiques escomptées; (ii) le mauvais rendement du traitement biologique de la STEP de Cambérène4 ; et (iii) la faible valorisation des sous-produits d’épuration. L’incapacité du sous-secteur à générer des ressources suffisantes pour son propre refinancement a négativement affectée la viabilité financière du projet. La redevance collectée à travers la facture d’eau des usagers et les subventions publiques sont en effet insuffisantes pour couvrir les charges d’exploitation de l’ONAS qui s’accroissent en raison des investissements engagés. Le projet à l’instar de la station dans sa globalité est jugé peu efficient.
- Le projet a permis d’amorcer le renforcement des capacités organisationnelles, techniques et financières. Il a en outre permis de renforcer la communication interne. Cependant, l’Etat n’a pas satisfait à la condition de l’accord de prêt concernant l’augmentation de la redevance assainissement ; l’ONAS restant tributaire pour une grande part de la subvention d’exploitation pour assurer un fragile équilibre des comptes annuels de résultats. Au niveau sectoriel, le projet n’a pas eu d’impact significatif sur la capacité de planification, de mise en oeuvre et de suivi. Dans l’ensemble l’impact du projet sur le développement institutionnel est jugé peu satisfaisant
- La durabilité des effets du projet n’est pas garantie pour un certain nombres de raisons, à savoir : (i) la faiblesse des capacités financières et matérielles de l’ONAS en raison du nonrespect par l’Etat de ses engagements consignés dans le contrat de performance Etat-ONAS ; (ii) les coupures intempestives d’électricité obligeant l’ONAS à utiliser des groupes électrogènes de secours onéreux mais indispensables (iii) les difficultés d’approvisionnement en carburant du fait des problèmes financiers de l’ONAS et (iv) l’impact négatif du projet sur l’environnement. Le Gouvernement ne semble pas pour l’instant montrer un réel engagement pour améliorer la situation très préoccupante de l’ONAS même si des réflexions sont en cours pour trouver des solutions durables. Le calendrier politique (présidentielles 2012) était de nature à faire perdurer la situation.
- La performance globale du projet est jugée peu satisfaisante.
Main Lessons
- Pour le Groupe de la Banque: L’émergence d’un partenariat public-privé dans le secteur de l’assainissement requiert un cadre institutionnel favorisant : (i) l’équilibre financier de la structure en charge de la gestion technique, commerciale et financière du service d’assainissement ; (ii) l’existence d’une société de patrimoine permettant de lever les fonds nécessaires au développement du secteur et de gérer les contrats d’investissement.
- Pour le Groupe de la Banque: L’existence d’une stratégie de valorisation et réutilisation efficiente des sous-produits de l’assainissement (eaux usées épurées, boue et biogaz) mise en œuvre effectivement est capitale pour rendre efficace une station d’épuration.
- Pour le Groupe de la Banque: L’adoption d’une approche globale à travers l’intégration des eaux pluviales et des déchets solides dans un projet d’assainissement des eaux usées permet d’apporter des solutions plus complètes aux problèmes d’assainissement liquide et d’insalubrité.
- Pour le Groupe de la Banque: La systématisation des Etudes d’Impact Environnemental et Social (EIES) dans les projets d’assainissement notamment ceux concernant les stations d’épuration est plus avantageuse qu’une stratégie inefficiente de catégorisation environnementale.
- Pour le Gouvernement et le Groupe de la Banque: Une modification profonde non maîtrisée de la dimension d’un projet peut conduire à des solutions peu optimales affectant négativement son efficacité.
Main Recommendations
Recommandation (s) au Bénéficiaire:
- Approche-programme : Le Gouvernement devrait, sur la base du nouveau plan directeur de la ville de Dakar en cours de finalisation, aller au-delà d’une gestion des projets ad-hoc d’assainissement en adoptant une approche-programme coordonnée multi-bailleurs afin d’apporter des solutions aux problèmes chroniques d’assainissement liquides et solides de la ville de Dakar.
- Renforcement des capacités financières de l’ONAS : Le Gouvernement doit renforcer les capacités financières de l’ONAS par : (i) l’augmentation de la redevance sur la base d’une nouvelle grille de tarification effectivement appliquée ; (ii) la gestion rigoureuse des impayés, en particulier ceux de l’administration et (iii) la recherche d’autres sources pérennes de financement pour améliorer la capacité d’autofinancement de l’ONAS.
- Renforcement du secteur de l’assainissement au Sénégal : Le Gouvernement doit envisager une refonte institutionnelle de l’ONAS en : (i) une société de patrimoine en charge de lever directement les fonds nécessaires au développement du sous-secteur et de gérer les contrats d’investissement et ; (ii) une société d’exploitation qui se limiterait à la gestion technique, commerciale et financière du service.
- Refonte de la règlementation : Le Gouvernement doit veuiller au respect de la réglementation applicable à la performance des stations d’épuration (niveau de qualité des eaux usées épurées) pour les rejets en milieu terrestre et fluvial et modifier celle liée au rejet en mer en fixant un objectif de qualité du milieu naturel qui orienterait les choix de dispositions techniques d’épuration.
Recommandation (s) à l'Agence d'execution:
- Développement d’une stratégie de valorisation et réutilisations des sous-produits : L’ONAS doit définir une véritable stratégie de valorisation et réutilisation efficiente des sous-produits d’épuration des eaux usées.
- Amélioration du rendement de la station d’épuration de Cambérène : L’ONAS doit : (i) mettre à niveau la filière boue de manière à limiter le rejet des boues avec l’effluent épuré ; (ii) protéger la station contre les risques d’inondation ; (iii) restaurer les équipements de prétraitements existants ; (iv) poursuivre les travaux de pose de l’émissaire du nouvel émissaire en mer ; le rejet actuel étant trop proche des plages et (iv) rechercher le financement pour la mise en œuvre de la 3ème filière dans le cadre d’un programme globale d’assainissement de la ville de Dakar.
- Protection de l’environnement : L’ONAS doit systématiquement réaliser, en parallèle aux études techniques, des EIES avec l’obligation de tenir des séances de concertation du public au cours desquelles seront présentées, outre les projets, leur impact sur l’environnement et les mesures pour limiter ces impacts (plans de gestion environnementale).
Recommandation (s) à la Banque:
- Qualité à l’entrée : La Banque doit s’assurer pendant la préparation du projet de la disponibilité des principales études conceptuelles et des choix technologiques retenus, pour une meilleure estimation des coûts et une réduction des délais de mise en œuvre qui compromettent les résultats des projets d’infrastructures. Les études de faisabilité complètes, de qualité, pourraient nécessiter un financement par les fonds fiduciaires et devraient inclure les aspects de suivi-évaluation, genre, environnement ainsi que la participation des bénéficiaires. Par ailleurs la prise en compte des leçons devrait être effective.
- Modification d’un projet : En cas d’insuffisance de financement, la Banque ne devrait concéder une modification profonde d’un projet qu’après une évaluation de l’impact de ce changement par rapport aux objectifs initiaux du projet ; autrement, la Banque devait s’assurer de la disponibilité des financements additionnels pour combler le gap
- Approche-programme : La Banque devrait orienter toute nouvelle action liée à l’assainissement de la ville de Dakar, dans le cadre d’un programme global intégrant les eaux usées, les eaux pluviales et les déchets solides, en liaison avec d’autres partenaires financiers.
- Systématisation des Etudes d’Impact Environnemental et Social dans les projets d’assainissement : En raison de la nature intrinsèque des projets d’assainissement, notamment ceux concernant les stations d’épuration, la Banque doit systématiquement exiger des études d’impacts environnementaux et sociaux avec des plans de gestion environnementale dotés de ressources nécessaires pour leur mise en œuvre.
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Projet d’assainissement de la ville de Dakar (PAVD).pdf | 5.48 Mo |